Post-peplum

Interview de Laurent Aknin, partie #2 / 24.3.16

Interview de Laurent Aknin, partie 2.

A lire sur l’auteur : Mythe et Idéologie du cinéma américain
Star Wars : une saga, un mythe.

[début]

Oeuvre

On va désormais plus se concentrer sur tes sujets d’étude et notamment sur Mythe et idéologie du cinéma américain et Star Wars, une saga, un mythe, tous deux chez Vendémiaire. Donc, on va arrêter avec les généralités – ou pas – : pourquoi le peplum et pourquoi le mythe ? Le peplum déjà parce que j’ai toujours adoré ça. Et je suis encore d’une génération qui a vu les derniers peplums italiens dans des salles de quartier ou de campagne. Parce que Spartacus, parce que Ben Hur, parce que La Chute de l’Empire Romain qui ressortaient régulièrement. Parce que dans les salles de quartier on voyait des peplums et que j’ai tout de suite accroché. Pourquoi ? Je n’en sais rien. Mais comme j’ai adoré le western italien et les films de kung fu, qui ont été aussi de très grands chocs. Mais le peplum est un genre extrêmement et intéressant. Je pense que j’ai gardé une affection particulière pour le peplum parce que c’est grâce au peplum que j’ai mordu au cinéma. Mais c’est aussi une question de chance : il se trouve que quand j’étais au collège, il y a eu des profs – tu sais, il y a parfois des profs qui sont géniaux, il y en a peu mais il y en a – qui nous ont fait faire de l’initiation au latin et au grec. Et, moi, fanatique de peplum, j’ai mordu ! Parce que ce que je voyais dans les peplum, on me l’expliquait avec de la langue : senatus populus quo romanum ! C’était du peplum pour de vrai ! J’ai donc pu demander à faire latin-grec au lycée ce qui voulait dire – il n’y avait pas de raison qu’on le refuse – intégrer un grand lycée, ce qui pour moi n’était pas évident non plus. Je veux dire quelqu’un qui, dans les années 1970, sortait de Belleville à Paris, Ménilmontant, n’était pas destiné à aller à Henri IV ou à Condorcet. J’ai donc intégré Condorcet, avec des profs encore plus barges, qui disaient, eux, que le cinéma faisait partie d’une culture générale, encore plus large, qui nous envoyaient au cinéma, qui nous faisaient faire des dissertations en latin sans traduction mais qui en même temps nous envoyaient au cinéma. Donc j’ai gardé une certaine affection pour mes premières amours cinématographiques car l’essentiel est venu de là. L’essentiel de ma culture est venu des salles de quartier, des salles populaires. Si je n’avais pas eu ça, cette entrée dans le cinéma populaire, je ne l’aurais sans doute pas eu. Chez moi il n’y avait pas de livre, il n’y avait que deux ou trois disques et le cinéma… On allait au cinéma du samedi soir en famille, mais ce n’était pas plus que ça. C’est grâce à ça, ça a été ma porte d’entrée. Si aujourd’hui j’écris des livres, c’est grâce à cela. C’est quelque chose de très important pour moi.

Créer des panthéons moderne pour compléter nos environnements mentaux : une fonction éternelle des fiction héroïque ?

Créer des panthéons moderne pour compléter nos environnements mentaux : une fonction éternelle des fiction héroïque ?

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Interview de Laurent Aknin, partie #1 / 24.3.16

Interview de Laurent Aknin, partie 1.

A lire sur l’auteur : Mythe et Idéologie du cinéma américain
Star Wars : une saga, un mythe.

Présentation

Bonjour, t’es qui ? Laurent Aknin. D’habitude quand je me présente je dis que je suis critique et historien de cinéma, ce qui a le mérite de ne pas vouloir dire grand-chose. Je ne suis pas un grand amateur de titres, de diplômes… J’ai une formation d’universitaire et aussi une formation sur le tas de journaliste. Je grenouille depuis 20-25 ans entre l’écriture, la critique de cinéma, des stages, des conférences, des choses comme ça, tout en faisant de la recherche sur l’histoire du cinéma sur des thèmes que je développe de manière empirique. Tout d’abord ça a été le cinéma bis, c’est-à-dire le cinéma populaire de second rayon ; puis j’ai élargi à l’ensemble du cinéma populaire et ayant malgré tout des souvenirs du lycée et de mes humanités, j’ai commencé à m’intéresser à la résurgence des mythes et des mythologies classiques ou contemporaines que ce soit dans le blockbuster ou le cinéma bis ou le cinéma de zone Z. Enfin voilà, je travaille comme cela depuis pas mal de temps. J’ai également fait de la programmation, de la sélection de festival… C’est divers, varié, mais il n’y a pas vraiment d’étiquette à ce que je fais.

Ca va ? J’veux dire la vie, la famille ? Pas beaucoup de famille, je suis un peu solitaire à ce niveau-là mais mon gang, comme on dit au Québec, mes amis vont bien et, ça, c’est très important pour moi. Sinon ça va bien parce que je fais depuis pas mal de temps ce que j’aime le plus faire, c’est-à-dire voir des films et voyager pour voir des films ! Effectivement, je bourlingue pas mal depuis quelques temps donc ça va.

Et sinon, tu as un vrai métier ? C’est bien là mon problème : c’est que je n’ai pas de vrai métier. Je n’ai jamais eu de vrai métier. Je crois que la seule fois de ma vie où j’ai exercé un métier à plein temps, c’est-à-dire avec des horaires de bureau, ça a duré trois semaines et c’était quand même pour faire de l’analyse de catalogue dans une société d’import-export de droit audio-visuel. Je n’ai pas de métier, c’est ça qui est assez étrange et c’est pour cela que je rends fous les agents enquêteurs du recensement ou mon conseiller bancaire, je ne parle même pas des employés de Pôle-Emploi – dont je n’ai jamais franchi les portes de toute manière, parce que j’ai pitié pour eux.

Une belle doublette d'ouvrage pour appréhender le travail du monsieur. Si vous avez le temps... il reste les gros pavés !

Une belle doublette d’ouvrage pour appréhender le travail du monsieur. Si vous avez le temps… il reste les gros pavés !

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Robin des Bois

Robin des Bois (Robin Hood)

Ridley Scott

Qui est l’auteur d’un film ? Ses scénaristes, son réalisateur, son chef opérateur, son monteur, ses producteurs (qui ne sont pas tous des méchants gros capitalistes avec des gros cigares, non c’est un poste plus qu’essentiel) ? Et bien tout le monde en fait, à des niveaux différents selon les projets.  Si en France, nous avons la culture de l’auteur-réalisateur (et un soutien de notre Etat pour les productions cinématographiques), il en va tout autrement aux Etats Unis, pour prendre l’exemple le plus opposé possible. Le cinéma y est une industrie dans laquelle un échec commercial est bien pire qu’un échec critique. Le seul propriétaire et décideur ultime est celui qui amène l’argent et, ce qui est compréhensible, veut un retour sur investissement. Le « il/producteur », ici, est souvent une ou plusieurs grandes maisons de productions.

Le réalisateur n’y est qu’un technicien embauché pour ses idées, son style ou son expérience, mais n’a pas son mot à dire. Chaque décision passe entre cinq conseils d’administration, des études de marché et le bon vouloir des décideurs. La résultante de tout cela, c’est que la production d’un film américain est souvent une machine absolument immense, où des centaines, voire plus, de personnes travaillent et doivent être dirigés, où chaque minute d’hésitation sur le tournage coûte des sommes folles et où la machine peut s’emballer et devenir un puits de dépenses sans fond (un bon exemple, Le Treizième Guerrier). Plus le film est gros, plus le problème est important.

Notre réalisateur du jour est le grand maître de ce genre de production. Il s’agit de Ridley Scott, qui arrive a tourner a une vitesse assez incroyable des grandes fresques – on l’évoquait déjà ici et -, à garder son style et ses idées (quand il en a le droit) et à ne pas trop dépenser (relativisons néanmoins), le tout avec souvent un résultat très réussi, qui se tient complètement. Du bon ouvrage, donc, bien que ses grands films se comptent sur les doigts d’une main. Il s’agit d’un de mes réalisateurs favoris et référence et, n’en déplaise au Vil Faquin [ndlf : j’aime bien ce qu’il a fait hein, mais depuis Robin des Bois, justement, il tourne à l’eau de boudin, tonton Ridou], nous toucherons deux mots des moments plus compliqués de sa carrières, notamment ses trois derniers films pour le moins décevants [ndlf : 4 si on compte la deuxième partie de Robin des bois]. Nous allons prétexter parler de son Robin des bois, de 2010, afin de parler de Ridley, puisque les grandes composantes de son cinéma y sont présentes et de manière presque caricaturale [ndlf : et c’est même pas moi qui le dit].

odod

Ridley Scott, c’est quand même un sacré paquet de bons films. Ou en tout cas de films cultes.

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Le Mythe

Le Mythe

Méninge Faquin

Il y a quelques temps, ceux qui suivent ce blog s’en souviendront, les privilégiés, le Lemming m’a invité à venir faire une intervention à la fin de la projection de l’incroyablement ép-touss*daubé*touss-ique Exodus: Gods & Kings de Ridley Scott – non sans dec’ coller Batman en Moïse ? C’est comme coller Conan en Mr Freeze : ridicule et suicidaire. Bref. Et donc j’étais allé faire cette intervention. Et voilà que je vais tenter de vous en livrer une rubrique pour nos Triangulations, en attendant une possible vidéo, un jour. Ou pas.

Au commencement il n’y avait rien. Ainsi commencent maints mythes fondateurs, dont le dernier n’est pas celui du Livre. Quand il n’y a rien, pas de structure organisationnelle globale, on appelle ça, en politique, l’anarchie. D’aucuns taxeront cette dernière de chaos et l’importance prise par la fédération des citoyens autour des symboles et des légendes fondatrices de la République, le 11 janvier dernier, en est un exemple parfait.

Les mythes, les légendes, les symboles, les religions, chacun et chacune à leur niveau, luttent contre le chaos. Zeus, Odin, Yahvé, Dieu, ont lutté contre le chaos, finissant par le dominer en s’imposant dans les esprits comme des symboles  : repousser le chaos, le déposséder, pour retrouver un pied à terre solide. Dans notre société sur-médiatisée, ces symboles, ces mythes (celui de l’égalité entre les hommes, proclamé dans le bouleversement révolutionnaire) tendent à évoluer, parfois de manière plus rapide qu’il n’y parait.

Tentons donc d’en faire un très rapide survol, en reprenant le cas – prétexte ? – qui s’est présenté le 6 février dernier. Nous aborderons donc ensemble dans un premier temps les questions de Mythe, de Légende et de Religion, avant de faire un tour, ensuite, du côté d’un genre particulier du cinéma, le post-peplum, particulièrement utile dans notre cas. Enfin, nous enfilerons nos collants en lycra pour tenter une approche comparative en survol.

On tend les bras devant, on gaine bien : It’s a bird! It’s a plane! No it’s Méninge Faquin!

Deux faces d'un même mythe.

Deux faces d’un même mythe.

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